Le Café Littéraire luxovien/Lectures Prix Chronos


 
Qu'est-ce que le prix Chronos ?

Depuis sa création en 1996, le Prix Chronos s'attache à faire réfléchir les jurés, et en particulier les jeunes jurés, sur le parcours de vie et la valeur de tous les temps de la vie, les souvenirs, les relations entre les générations, la vieillesse et la mort, les secrets de famille ainsi que la transmission des savoirs. Le but est de mieux se connaître entre générations pour mieux vivre ensemble.

Les lecteurs du Café littéraire luxovien et de la Bibliothèque municipale de Luxeuil participent à ce prix en lisant les ouvrages en lice dans la catégorie classes de 3ème et 4ème proposés aux élèves de la classe de 1ère ASSP (Accompagnement Services et Soins à la Personne) du Lycée Lumière de Luxeuil par leur professeur et documentaliste, élèves avec lesquels ils échangent lors de rencontres intergénérationnelles.

                                                                                                               

Prix Chronos 2020

À l'occasion du Prix Chronos de littérature, possibilité de faire partie du jury et rencontre intergénérationnelle entre lecteurs âgés et adolescents autour des 4 romans proposés au prix cette année dans la catégorie classes de 3ème et 4ème :
         
        
  La vie est un jeu d'échecs, Om SWAMI (éd. Fleurus 2019) =>Obtient le Prix Chronos 2020 

La fille d'Avril, Annelise HEURTIER (éd. Casterman 2018) =>Meilleur choix des accompagnateurs et des personnes âgées

        ― Fréquence Orégon, Loïc LE PALLEC (éd. Sarbacane 2018)

        ― On habitera la forêt, Esmé PLANCHON (éd. Casterman 2019)

 

La vie est un jeu d'échecs, d'Om Swami (éd. Fleurus 2019) 

lecture par Marie Holder :

Vasu raconte la chance qu'il a eue enfant de rencontrer un adulte généreux et bienveillant. Grâce à lui, il a pu réaliser son rêve de devenir un grand champion d'échecs. À son tour, il transmettra ce que le «Maître» lui a appris, des échecs... et de la vie.

Vasu a grandi dans une famille indienne modeste avec des parents aimants qu'il respecte mais dans une Inde moderne où le poids des traditions est encore grand. On le constate quand il raconte le mariage de sa sœur, ou quand il rappelle l'appartenance de sa famille à la caste ancienne des brahmanes.
       C'est un adolescent impatient, capricieux, facilement irritable, vite en colère s'il est frustré de ne pas obtenir tout de suite ce qu'il veut.
       Il a une passion : le jeu d'échecs.
       Un vieux Monsieur, dont on saura seulement à la fin qu'il a été autrefois champion du monde d'échecs, mais qui vit pour l'heure incognito, le remarque dans un tournoi. Ce vieil homme lui donne des leçons gratuites et des conseils pour le faire progresser dans son jeu, mais pas seulement. «Il m'offrait, dit Vasu, des pépites de sagesse...» 
       Le roman est l'apprentissage de ses progrès aux échecs, et dans la sagesse de la vie. Et on s'aperçoit que les conseils donnés à Vasu... s'adressent aussi à nous!

Autre intérêt de ce livre facile à lire: par le biais de la métaphore du jeu d'échecs souvent utilisée, on peut réfléchir et développer:
       «Que ce soit dans la vie ou aux échecs [dit le Maître]..., etc .
       Si «La vie est un échiquier dont nous sommes les pions... », etc.
       On peut même terminer et ce n'est pas de la fiction par AlphaZéro, le programme informatique qui a permis à la machine de battre Kasparov aux échecs. À suivre... Mais c'est un autre sujet.

 

lecture par Adéla :

Se lit agréablement l'histoire de cet ado passionné d'échecs et de leur apprentissage pour en devenir un maître. Apprentissage qui est aussi celui de la vie. Vasu, l'adolescent indien, a un vieux maître avec qui il travaille les échecs, et des parents super compréhensifs qui font tout pour l'aider dans la voie qu'il a choisie. 
       C'est un roman typique des rapports de transmission qui peuvent exister entre ado et vieillard. Même si à certains moments, Vasu se cabre... 
      
Le récit écrit à la première personne, celle de Vasu qui raconte, non sans quelques pointes d'humour, appartient à cette sorte de roman pour adulte, qu'un ado peut lire, ou pour ado, qu'un adulte prend plaisir à lire. 
       Écrit par Om Swami, moine bouddhiste, c'est une leçon de vie. Pour tous. Et si à certains moments on est tenté de lui reprocher un ton peut-être un peu trop empreint de bonnes paroles, il se termine dans l'émotion... ce qui rachète plus qu'amplement ce ton-là... 

 

La fille d'avril, d'Annelise Heurtier (éd.Casterman 2018)

lecture par Adéla :

       Passé le premier chapitre situé en juin 2018, qui met en dialogue une petite fille, Itzia, et sa grand-mère, Catherine, à la recherche d'une ancienne robe de jeunesse au grenier, le récit devient intéressant, vivant et plein d'humour décalé, de cette grand-mère qui se confie. 

Catherine, évoque pour Itzia les conditions de vie des filles de sa jeunesse lors des années 60. Ce qu'elle relate est très vrai. Les mamies d'aujourd'hui peuvent en témoigner qui y reconnaissent l'univers de leur enfance et adolescence. Le roman leur rappelle bien des détails enfouis dans les méandres de leur mémoire: la séparation des filles et des garçons en classes différentes, les pantalons qu'il était très mal vu et interdit de porter, de même que  se maquiller, les protections périodiques en tissu, à laver, le tricotin en forme d'amanite tue-mouches qu'elles ont eu, les bigoudis du samedi soir avec lesquels il fallait dormir, mal, selon l'adage qu'il faut souffrir pour être belle, certains titres de chanson, etc... L'auteure, née en 1979, n'a pas pu les vivre mais s'est beaucoup documentée auprès de personnes, ados dans les années 60, pour écrire son livre.

La Catherine du roman vit un peu un conte de fée dans la mesure où elle bénéficie d'une bourse d'étude octroyée par le gros industriel textile de leur petite ville. Ce qui l'aidera à sortir de son milieu étroit. Lui donnera le désir d'oser. D'abord avoir un petit job pour se faire de l'argent de poche, que la plupart n'avaient pas à l'époque où les jeunes qui travaillaient, dès quatorze ou seize ans, donnaient tout ou partie de leur paye aux parents. Puis s'adonner à sa passion de courir, sport qui était prohibé pour les filles qui devaient se cantonner à la gymnastique, question soi-disant de santé. Passion de courir qui débouchera pour Catherine sur le métier de professeur de sport dans lequel elle s'épanouira à l'écoute de ses élèves, connaissant leurs problèmes...

Ce récit narre la révolte, féministe mais obéissante et pacifiste, de Catherine face aux préjugés sur les femmes, aux interdits qu'elles subissent parce qu'elles ne sont pas nées garçons, à leur relégation au foyer comme mères pondeuses et éleveuses d'enfants...

On y voit très bien l'évolution des rapports entre adultes et ados, qui aujourd'hui communiquent mieux. La petite fille Izia et sa grand-mère Catherine sont très complices et discutent en toute liberté. L'intérêt d'Izia, sa curiosité pour la vie d'autrefois de cette grand-mère, bien différente de celle qu'elle mène aujourd'hui, l'amène à poser la grande question, la question éternelle des ados, la découverte de l'amour. La réponse n'y est qu'esquissée...

Bref, c'est un récit de transmission, par la grand-mère à sa petite fille curieuse, de la société des années précédant mai 68 ou couvait la révolte. Comme elle couve aujourd'hui...

 

Fréquence Orégon, de Loïc Le Pallec (éd. Sarbacane 2018)

lecture par Marie Holder :

       Roman de SF
       Idée générale intéressante et belle :
       Dans un monde d'après le grand effondrement de la civilisation, un monde dévasté, ravagé, où chacun lutte égoïstement pour sa survie, un petit groupe de jeunes entreprend un long voyage pour s'échapper du monde devenu une prison invivable. Ils répondent à l'appel d'une voix lointaine et mystérieuse dont ils ont réussi à capter des bribes. Elle leur promet un monde nouveau.
       C'est une quête vers un idéal.

Première partie : la constitution du groupe de jeunes gens venus, au hasard des événements tragiques, d'horizons très différents, mais rassemblés autour de ce qui les unit: le refus du monde tel qu'il est devenu, la solidité et la force de l'amitié, la solidarité, le goût du partage et de l'entraide, le refus du chacun pour soi, la tolérance, le respect des différences, et beaucoup de courage au service de tous.
       Deuxième partie : pour répondre à cet appel lointain, leur fuite à travers un monde ensauvagé pour échapper à tous les dangers et aux mauvaises rencontres. La rencontre tout de même d'un adulte bienveillant et solitaire qui survit en autarcie loin du chaos du monde, et qui va leur venir en aide. La déception finale aussi quand la réalité ne correspond pas leurs rêves...
       Epilogue :
Une fin optimiste. Les robots ne domineront pas les humains mais les aideront à sauver la nature et l'humanité. En leur construisant une sorte d'Arche de Noé ?

De bonnes idées mises en avant, des sentiments généreux exprimés, des questionnements intéressants mais j'ai trouvé l'ensemble d'une lecture fastidieuse. J'ai failli abandonner au cours du voyage et ne jamais arriver au but! Les personnages sont des stéréotypes. Les bons, les salauds, c'est binaire. Seul le robot Seven serait presque subtil, qui comprend l'amitié sans pouvoir la ressentir dans une chair humaine qu'il n'a pas. Mais l'idée n'est pas développée ensuite. Et les chaos du monde avec tous ses malheurs listés parfois de façon plate, c'est lourd en écriture. On sature vite.
       Petites remarques de détail amusantes: les conseils de survie en milieu hostile, ça peut servir! et de jolies trouvailles aussi telle la découverte de Las Vegas en ruine envahie par les singes capucins (comme les temples d'Angkor?) Je verrais bien l'image en BD.

Ce roman me semble cibler de jeunes lecteurs ados/jeunes adultes adeptes par ailleurs de jeu vidéo ou d'escape game.

 

On habitera la forêt, d'Esmé Planchon (éd. Casterman 2019)

lecture par Adéla :

       Joyce, treize ans, habite Lyon six mois de l'année où elle est lycéenne moquée par les autres élèves. Sa mère est comédienne, (on retrouve le milieu théâtral dans lequel l'auteure a été élevée) souvent en déplacement les six autres mois.
       Joyce va passe ses vacances à la campagne chez sa mamie. Se promène en forêt en pensant au poèmes de Rimbaud dont elle a emporté le livre. 

Elle y rencontre Sylvia, une ancienne prof, la cinquantaine, perchée sur un arbre, et Dorothy, mono de colo. Elles se confient, parlent de leur existence. Aiment se retrouver, aimeraient vivre dans la forêt. Décident de construire une cabane bibliothèque dans un arbre. Puis de fil en aiguille, apprenant que la forêt est menacée par un projet de construction d'une pépinière de sapins de Noël, elles décident d'agir pour la sauver... Ce sera en organisant un spectacle en forêt, qui attirera d'autres personnes à construire elles aussi des cabanes en forêt...

Le récit est plaisant, plein de loufoqueries de langage et de bonnes intentions. Il est destiné aux ados. Il met en lumières leurs rapports avec les adultes: Joyce et sa grand-mère, Joyce et son amitié avec une Sylvia quinquagénaire. La transmission des valeurs. L'amitié. L'union collective qui fait la force. Y sont évoquées les luttes écologiques de ces dernières années, Notre Dame des Landes, Bure...  

 

 

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