Le Café Littéraire luxovien / Les Petites fugues 2005

 

 

Sur le thème : Le Temps de la lecture, se mettre en décalage horaire 

 

 

 

 

 

Rencontre avec Denis Grozdanovitch

Denis Grozdanovitch à Luxeuil©Marie-Paule Zert
Denis Grozdanovitch à Luxeuil 
Photos : Marie-Paule Zert

   

Le Café Littéraire luxovien
recevait l'écrivain
Denis Grozdanovitch

le 23 novembre 2005 à 20 h.
pour une Lecture-rencontre,
à la Bibliothèque Municipale
de Luxeuil-les-Bains,
avec l'aide du CRLFC,  dans le cadre des Petites fugues en littérature contemporaine.

 

Denis Grozdanovitch à Luxeuil©Marie-Paule Zert

 

Marie-Françoise Godey :

Ce qui surprend chez Denis Grozdanovitch, c’est le visage, qui passe très rapidement de la concentration la plus sérieuse au sourire large et franc, au rire même, et vice versa.

Dans ses propos, il emploie l’expression « Faire contre mauvaise fortune bon cœur ». C’est peut-être pour cela, que dans ses carnets, très soignés, écrits en solitaire à la pointe rothring pour un «Charmant Eventuel Lecteur, (car on n’écrit jamais seul, on écrit toujours pour autrui) », sur des pages sans ratures et sans réglure, et qu’il nous a montrées, l’écriture est ascendante. Signe, dit-on, d’une nature optimiste, qui ne se laisse pas enfermer dans la tristesse, dans le pessimisme, même s’il est très lucide et sensible aux graves problèmes actuels, engendrés par la vitesse, le stress, la violence, etc. qu’il aborde dans ses ouvrages.

Il y réagit en une sorte d’ « individualisme solidaire » (terme repris à Loriot), et se dit « anarchiste conservateur ». « Il vaut mieux lutter dans son coin, plutôt que de commencer à proposer des plans extrêmement ingénieux, comme le font les technocrates, qui englobent le monde entier la globalisation même intellectuelle, est une chose qui me donne le vertige », dit-il encore.

Mais cet aspect politique est loin d’être le plus important, il y a de toute façon un aspect littéraire et poétique dans les écrits. D’une grande culture bien qu'ayant abandonné ses études à dix sept ans, suite à sa réussite tennistique qui lui a permis de « vivre extrait du côté contraignant de l’époque, du travail au sens industriel du terme », − il est grand lecteur et fréquente assidûment le dictionnaire, emploi bien des mots pour leur résonance, leur musicalité dans la phrase.

Ne voulant pas ennuyer les personnes présentes, dont nombre connaissaient ses deux premiers ouvrages, il a lu de larges extraits de « Brefs aperçus sur l’éternel féminin », à paraître en mars 2006, "commande" de l’éditeur Robert Laffont. Livre en grande partie sur la séduction, aux textes retravaillés (avec son épouse complice, pour correctrice en phase finale), et toujours à partir des notes de ses carnets qu’il prend tous les matins, ceux-ci étant un véritable vivier dans lequel il lui suffit de puiser sur n’importe quel thème, puisqu’il aborde tous les sujets.

Il introduit ces « Brefs aperçus sur l’éternel féminin » par un exergue du grand humoriste et moraliste anglais qu’est Gilbert K. Chesterton : « La raison pour laquelle les hommes ont depuis l’origine de la littérature toujours parlé des femmes comme si elles étaient plus ou moins folles est simplement que les femmes sont naturelles et les hommes avec leurs cérémonies et leurs théories, très artificiels. » Ce qui donne le ton.

Le public − et l’auteur lui-même, en lisant certains textes des plus drôles −, a ri à gorge déployée, et très souvent, mais a eu également des moments d’émotion intense à l’écoute d’autres, en particulier l’un de ceux dans lesquels Denis Grozdanovitch évoque sa fille. Nous confiant en fin de compte et la gorge serrée, que pour lui, ce livre est un moyen, en fait, de parler d’elle, d’en exprimer la perte, à travers des "histoires" vécues, – pas uniquement avec elle d’ailleurs –, cocasses et drôles, mais aussi poignantes. Car s’il comporte beaucoup de textes humoristiques, mais nullement scabreux, ce livre comporte aussi des textes qu’il qualifie de « mélancoliques ou plutôt graves ».

Derrière une "désinvolture", et une joyeuseté réelle, Denis Grozdanovitch qui est aussi un excellent conteur et aime tester ses histoires oralement (le public de Luxeuil eut la primeur de l’une d’elles, qui entrera n’en doutons pas, dans un prochain ouvrage), abrite donc des plaies, vit avec ses fantômes.

Est-ce l’explication de ce visage tantôt sérieux et tantôt gai ? L'humour étant un moyen de pallier à la douleur, « Transcender une situation atroce par le comique, ou la dérision... », de résister, comme c’est le cas de l’humour juif, anglo-saxon, italien...

Nous l’avions pressenti à la lecture du Petit traité de désinvolture et de Rêveurs et nageurs, Denis Grozdanovitch est un être sensible, profond, franc, ouvert à tous et déridant. Nous en avons trouvé ce soir la confirmation, par ses propos, son attitude. Ce qui nous le rend d'autant plus attachant.

 

Denis Grozdanovitch à Luxeuil©Marie-Françoise Godey
Photo Marie-Françoise Godey

 

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